Syndicats et salariat : chronique d’une mort annoncée ?
Selon une étude publiée en 2015 et reprise dans un article du journal Le Monde sous le titre évocateur « A quoi sert un syndicat », moins d’un Français sur deux jugerait les syndicats utiles… Et, depuis, la dynamique ne semble pas avoir changé. Nés avec le statut de salarié, vus comme un contre-pouvoir utile et nécessaire pour contrebalancer le pouvoir du patron, ils sont aujourd’hui, plus que jamais, remis en question dans leurs fondements, poussés à réfléchir à leur raison d’être. Au point de faire dire à Laurent Berger en 2018, alors numéro un de la CFDT, que « le syndicalisme est mortel ».

Et pour cause, alors que nombre d’entreprises travaillent à bâtir des organisations débarrassées d’un fonctionnement purement hiérarchique, à rendre leurs collaborateurs autonomes et responsables, rendant le lien de subordination qui lie chacun à son entreprise, à son patron, obsolète, salariat et syndicats se voient invités à changer en profondeur. Le contrat de travail, assis sur ses trois piliers que sont le lien de subordination, la fourniture d’un travail et la rémunération de celui-ci ne semblent plus opérer dans un environnement où le salariat sera de moins en moins la règle. Mais, est-ce à dire que syndicats et salariat sont promis à la disparition ? Pour être remplacés par quoi ? La question mérite d’être posé
Peut-on encore gouverner les personnes ?
Si pendant des décennies cette question aurait été vue comme saugrenue, il en va autrement aujourd’hui. Et pour cause, beaucoup d’entreprises s’interrogent sur l’opportunité d’abandonner un modèle d’organisation conventionnel, dit hiérarchique. Avec quelques objectifs à l’horizon : bâtir une organisation plus efficiente, qui s’appuie sur des collaborateurs autonomes et responsables, sur des équipes fidèles et engagées.
Du pair à pair ?
Dès lors, vouloir gouverner les personnes dans une organisation apparaît inadapté voire anachronique. Pour continuer à exister, à se développer, l’organisation doit se réinventer, opérer une complète transmutation vers un modèle construit sur des règles communes, partagées, explicites et transparentes, sur un pouvoir constitutionnel du type holacratie. Fini le modèle pyramidal, le « top-down ». Chaque collaborateur est autonome et responsable, occupe une place à part entière, est en charge de rôles pour lesquels il entretient des relations de pair à pair avec ses collègues. Fini ce lien de subordination omniprésent qui caractérise le modèle conventionnel. Et, bien que désormais pleinement autonome et responsable, ce management constitutionnel invite chaque collaborateur à jouer collectif, à partager et à échanger avec ses pairs. Il ne prend sa place et toute sa valeur qu’au sein d’un collectif, de l’organisation.